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La maîtrise de l’impact environnemental est omniprésente dans les médias et la presse. Les citoyens sont incités à consommer, (sic) plus responsable. Les obligations de transparence des entreprises s’accroissent avec la directive de reporting de durabilité (CSRD). Au 1er janvier 2025, la loi REEN impose aux collectivités de plus de 50 000 habitants de définir une stratégie numérique responsable. Pourtant, les actions semblent insuffisantes à l’échelle des enjeux planétaires. Les citoyens, les entreprises et les politiques n’agissent pas efficacement pour progresser dans la bonne direction. C’est le « triangle de l’inaction », théorisé par Pierre Peyretou, professeur affilié de l’ESCP (École supérieure de commerce de Paris).

Je suis Antoine, Consultant appel d’offres et numérique responsable chez ILKI. Mon parcours initial est un Master en Thermique des bâtiments à l’Université Pierre et Marie Curie. J’écume les évènements pour comprendre les dynamiques de l’écosystème du numérique et de la responsabilité des organisations. J’y apprends également de mes pairs et des fournisseurs pour enrichir ma rédaction de marchés publics.

En juin dernier, j’ai assisté à la table ronde animée par Anne-Sophie Novel, journaliste spécialisée sur le développement durable, l’action climatique et la protection de la biodiversité, lors de l’évènement « Tech for Climate ? », organisé par le groupe Constellation. Je recommande vivement le visionnage du replay inspirant de cette session.

 

L’analyse de sensibilité pour identifier les décisions à impact

Sophie Engster, co-fondatrice de Chamberlan, a partagé son expérience de dirigeante d’entreprise. La sphère politique dessine un terrain de jeu économique, avec ses contraintes réglementaires. Les dirigeants « font avec les règles du jeu » et constituent des réseaux pour partager les bonnes pratiques. Je me réjouis que de nombreuses organisations publiques et organismes normatifs publient des référentiels d’actions tandis que les entreprises technologiques diffusent des livres blancs. Lorsqu’on manipule ces outils, le travail de recoupement est encore à faire.

Il est rassurant d’entendre d’une dirigeante que le « risque réputationnel » de ne pas agir est trop grand. Les entreprises sont « demandeuses de règles pour faire évoluer leur business model et prendre un coup d’avance sur la concurrence ». L’étude de PwC sur plus de 500 entreprises de PwC concorde : la majorité des entreprises européennes considère la CSRD comme une opportunité (source : La CSRD, une opportunité pour les entreprises (novethic.fr)).

Lors de mon parcours universitaire, j’ai pratiqué la propagation d’incertitudes de calcul et l’analyse de sensibilité sur des modèles thermiques de bâtiments. L’erreur des modèles se cumule à l’incertitude des données. L’analyse de sensibilité permet cependant d’obtenir des constats au-delà de l’incertitude de calcul.

Pour commencer à agir, Eric Duverger, fondateur de la Convention des Entreprises pour le Climat, rappelle qu’il faut « [prendre les décisions] ayant le plus d’impact ». Il s’agit essentiellement d’un travail de modélisation des organisations et d’analyse comptable leurs impacts. Déterminer l’action ayant le plus d’impact, c’est alors déterminer la sensibilité du modèle dans différents scénarios et contraintes.

 

Les achats durables en amont du problème

Le nombre de parties prenantes est tel qu’il faut « inventer de nouveaux modes de collaboration » selon David Djaïz, entrepreneur et essayiste à Sciences Po. Les décisions appellent à une « négociation entre territoires », à une recherche de « consensus » entre acteurs ayant des opinions différentes. Il faut « faire le pari de prendre ce que [chacune et] chacun a à apporter ».

La « contractualisation » par appel d’offres et l’examen des déclarations environnementales sont des outils qui permettent la négociation entre entreprises. En amont du cycle de vie des services IT, les acheteurs IT ont la lourde tâche de déchiffrer les arguments des fournisseurs dans cette jungle informationnelle.

 

 

Dans ma mission de consultant en appels d’offres, mon but est d’éclairer les acheteurs et de stimuler l’offre fournisseur pour répondre à la demande, de la chaîne d’approvisionnement jusqu’à la valorisation en fin de vie. L’étape du sourcing fournisseurs permet d’apprécier les capacités des acteurs économiques. L’analyse sur des critères environnementaux, sociaux et sociétaux à plus de 10 % encourage les initiatives. Il y a clairement matière pour une dizaine de chapitres dans les mémoires techniques des candidats.

S’il y a urgence sur le climat, où sont les ambulances ?

Je partage les regrets d’Eva Morel, co-fondatrice et co-présidente de QuotaClimat, sur le traitement médiatique « anxiogène » et le peu de temps alloué sur les questions environnementales. Les « médias ne sont pas au niveau » de l’enjeu de diffusion de la science. La fourniture d’information est un acte « performatif ». « Couvrir l’actualité sans donner les clefs de l’action rend impuissant ». La désinformation ne se limite pas à l’environnement et a effet sur les questions d’intérêt général : éducation, services publics, traitement des inégalités. En réponse, la société a besoin de se former à l’esprit critique et constituer une réelle « hygiène mentale ».

Cette prise de recul est nécessaire y compris pour les groupes actifs sur les questions environnementales. Iris Viloux a montré que le terme « urgence climatique s’intègre durablement dans le discours publics en 2019 » (source : « Urgence climatique » : l’itinéraire d’une expression (theconversation.com)). David Djaïz souligne « l’écart entre le constat [d’urgence climatique] et l’action ». Cette contradiction beaucoup trop forte paralyse le changement. Pour cette raison, j’ai choisi d’éviter le terme « d’urgence climatique » dans le contenu de formation que je produis. L’appel au sentiment d’urgence ne me semble pas fonctionner.

 

Je rêve d’un futur transformé par la coopération

À partir de ce constat, quel enthousiasme retrouver ? Catherine Touvrey, directrice générale d’Harmonie Mutuelle, souligne l’importance du levier « émotionnel » et du levier « relationnel » pour arriver à un changement. Elle insiste sur « l’envie plutôt que la sanction et la répression » comme moteur de l’action. Quel projet de société pourrait susciter une envie de demain ? L’ADEME propose un imaginaire de transformation de la société pour 2050 en 4 scénarios (source : Les scénarios – Agence de la transition écologique (ademe.fr)). La coopération territoriale me semble le plus enviable.

Coopérer nécessitera d’arbitrer entre les besoins. Lorsque je parcours les solutions de mon quotidien, l’écart entre le besoin réel final et les services rendus est colossal. Je ne peux que m’aligner sur les notions de « cobénéfice » et de « double dividende » évoqués dans la table ronde. Pour chaque progrès environnemental, il y a la place pour un progrès dans l’adéquation aux besoins.

 

Note de l’auteur

Ce contenu a été rédigé par un humain à partir de sa prise de notes lors de la table ronde de Tech 4 Climate. Aucune intelligence artificielle n’est intervenue dans la rédaction.